La vision du CRM de Romain Roy, VP Marketing & Trading chez PerfectStay

23 janvier

PerfectStay est notre client depuis quelques années. Start-up française spécialisée dans les solutions de travel B2B, nous avons demandé à Romain Roy, VP Marketing & Trading chez PerfectStay, de répondre à quelques questions pour nous partager sa vision du CRM et quelques bons conseils à mettre en place améliorer vos pratiques CRM.

Est-ce que tu peux te présenter en quelques mots ?

Bien sûr. Cela fait maintenant près de douze ans que je gravite dans l’univers du digital, et plus précisément du e-travel. Avec deux expériences assez éloignées, mais toujours dans l’univers du voyage : tout d’abord une expérience très corporate chez lastminute.com, site B2C présent un peu partout à travers le monde, et une deuxième expérience orientée start-up chez PerfectStay, toujours dans l’univers du voyage mais avec un modèle B2B2C quelque peu différent du premier.

En quoi consiste ton rôle en tant que VP marketing & trading chez PerfectStay ?

Chez PerfectStay, mon rôle va être un peu plus large que le seul univers du marketing même si mon objectif reste assez simple : atteindre les objectifs de revenus et de marge que nous avons sur l’année pour l’ensemble de nos partenaires. C’est un objectif très macro.

Pour ce faire, j’ai plusieurs cordes à mon arc. Le marketing en est une avec la stratégie d’acquisition, de conversion, d’activation et de fidélisation. Je gère aussi en partie le développement de notre produit afin d’optimiser en continu nos plateformes pour qu’elles soient le plus efficaces possible. Enfin, j’ai une relation forte avec nos équipes Production parce que le nerf de la guerre reste le produit que l’on vend. Il faut s’assurer que l’on propose un service en adéquation avec ce que recherchent nos futurs clients.

Quelles sont les habitudes par lesquelles tu démarres ta journée de travail ?

Je débute mes journées toujours de la même manière, avec un latté et une revue de tous les chiffres de la veille. Je prends toujours dix à quinze minutes pour regarder les performances de la journée qui vient de s’écouler en termes de trafic, de conversion, de revenus et de marge. C’est la petite habitude que j’ai prise et qui me permet de bien démarrer ma journée. On a une Business Intelligence assez complète donc on a accès à beaucoup de rapports, de data, c’est ce qui nous nourrit tous et qui fait vraiment partie de l’ADN de PerfectStay.

Est-ce que tu aurais une bonne pratique à partager, que tu aurais mise en place récemment, et qui a un impact positif sur ton travail ?

Je pense que la crise qu’on a connue ces deux dernières années avec le Covid m’a permis de prêter plus d’attention à la surréaction. Nous avons parfois tendance à surréagir, confrontés à une grande quantité de data. Cela peut avoir ses avantages, d’avoir une vision claire de l’état de son business, mais ça peut aussi avoir des inconvénients.

Un de ces inconvénients, c’est la surréaction. On va avoir tendance à mener des actions immédiates en constatant qu’un KPI ne va pas dans la bonne direction. Par exemple, lors d’une journée où le trafic baisse, je vais tout de suite chercher à comprendre pourquoi je n’ai pas assez de trafic et mettre en place des actions. Si mon taux de conversion tombe, je vais en chercher les raisons et mener des actions. Je pense que la crise a exacerbé cette tendance. J’étais moi-même beaucoup dans la surréaction. Dernièrement je me suis posé, je me suis dit qu’il ne fallait pas surréagir, qu’il pouvait se passer des choses d’une journée à une autre. La crise m’a aidé à prendre du recul là-dessus, et c’est très positif. Le plus important, c’est de se poser, de creuser ses analyses, voir si le problème est structurel, pour éviter la surréaction.

Est-ce que l’on t’a déjà donné un conseil que tu voudrais partager aujourd’hui ?

On m’a donné beaucoup de conseils au début de ma carrière, mais je pense que l’un des plus intéressants, c’était de commencer par maîtriser et comprendre l’opérationnel avant de vouloir s’élever. Quand on est jeune, on a envie de grandir très vite, de prendre des responsabilités. Mais je pense qu’on est meilleur lorsqu’à un moment donné, on a eu à gérer, contrôler, maîtriser et développer l’opérationnel. Ça permet de prendre de la hauteur en comprenant les enjeux de nos équipes et je pense que ça peut faire de nous de meilleurs managers. Il faut commencer par “faire” avant de “faire faire”.

Est-ce qu’à l’inverse, tu aurais le souvenir d’un mauvais conseil qu’on t’aurait donné et que tu n’aurais pas dû suivre ?

Quand j’ai débuté dans le marketing, j’étais focalisé sur deux choses : le ROI et la performance. Ça pouvait parfois créer des rivalités avec les équipes Marque qui travaillaient plutôt sur la considération. J’avais l’impression qu’ils étaient sur des logiques assez simplistes d’achat de visibilité. De notre côté, nous étions beaucoup plus challengés sur la partie ROI et je pensais que mon métier était le métier qui permettrait à mon entreprise de faire du volume. Je pense que c’était une erreur et j’en suis d’autant plus conscient aujourd’hui : ce sont deux aspects du business qui se complètent totalement.

Faire de la performance sans avoir une marque qui a une certaine notoriété, c’est beaucoup plus compliqué. Aujourd’hui, je prône le travail de considération, les investissements sur l’image, parce que derrière, ça a un impact sur l’ensemble de la chaîne de valeur et sur tous les leviers d’acquisition qui sont à la performance. J’ai plusieurs exemples aujourd’hui qui montrent que travailler sur une belle marque avec une belle notoriété, ça aide grandement à améliorer nos KPIs.

Il faut donc avoir une stratégie globale, considérer l’image autant que les leviers à la performance pour avoir des résultats bien meilleurs.

Est ce que tu aurais des exemples de livres, de blogs ou de personnalités qui t’influencent aujourd’hui ? Des choses que tu suis et qui t’aident dans ta prise de recul et dans la vision de ton métier ?

Il y a un livre qui a changé pas mal de choses sur ma perception et sur ce que j’avais envie de faire : “Zero to One” de Peter Thiel qui explique l’innovation de rupture et comment créer de la valeur.

Pourquoi ça a eu un impact chez moi ? Parce que mes premières expériences étaient dans une boîte assez corporate qui s’appelait lastminute.com, où j’ai pu faire mes classes. J’ai débuté en tant que stagiaire, j’ai terminé Directeur Marketing, mais j’avais cette impression de ne pas créer quelque chose. Je reprenais des logiques, des stratégies qui étaient déjà en place et je continuais à les appliquer, à faire en sorte qu’elles continuent à performer et à fonctionner. Le jour où j’ai lu ce livre, je me suis demandé si j’étais capable de partir de zéro et de créer quelque chose de mes propres mains, un produit, une stratégie marketing from scratch, et de la faire performer ?

C’est à ce moment-là que les quatre fondateurs de PerfectStay m’ont approché, avec une idée de start-up. Il y avait tout à construire sur la partie marketing. C’est arrivé au moment où je me posais toutes ces questions et j’ai décidé de prendre ce risque et de tout construire. On est partis de zéro, il n’y avait rien. On réfléchissait à notre proposition de valeur, à la stratégie marketing que l’on mettrait en place derrière. J’ai démarré sur ce “zéro” et on a réussi à aller jusqu’au “un” avec PerfectStay. Ensuite on a fait le 100 et on continue de toujours regarder en avant…

Ce livre m’a fait m’interroger sur beaucoup de choses et qui m’a permis de prendre une grande décision : de passer de la grande entreprise à la start-up. Aujourd’hui, je le referais sans hésiter.

Est-ce que tu écoutes des podcasts ? Est-ce que tu as des podcasts que tu voudrais recommander ?

J’écoute beaucoup de podcasts. Si on reste dans l’univers du e-business et du marketing, j’ai trois podcasts que je suis :

  • Le Panier de Laurent Kretz
  • Digital Doers de Cyril du Plessis
  • Maker de Gabriel Gourovitch

J’en ai un petit dernier, plutôt thématique lifestyle, que j’aime beaucoup, c’est Guerre de business. Ce podcast raconte des histoires de guerres entre grandes marques telles que Apple vs Microsoft, Instagram vs TikTok, Airbus vs Boeing, MacDonald’s vs Burger King, PlayStation vs Nintendo. C’est très sympa pour se détendre.

Comment identifies-tu les gros challenges du marketing sur ces prochaines années ?

Pour moi, nous avons tous un peu le même challenge principal, et il s’agit de la gestion des données personnelles. Je parle de la gestion des données personnelles de manière très large.

Je pense qu’il y a un autre challenge que vous connaissez bien chez Tinyclues, c’est le Mail Privacy Protection (MPP) sur Apple iOS 15 qui a eu un impact énorme sur la manière dont on suit nos KPIs sur la partie activation et sur la partie email. Cette mesure nous empêche d’avoir une bonne vision sur nos taux d’ouverture. Aujourd’hui, de très nombreux triggers, aussi bien en activation marketing qu’en segmentation, sont liés à l’ouverture. C’est quelque chose qui nous oblige à nous renouveler en suivant de nouveaux KPIs, en adaptant nos segmentations et nos triggers marketing.

Le consentement cookie a aussi eu pas mal d’impact sur la manière dont on suit nos audiences suite à la mise en place du RGPD.

Ces choses représentent plein de petits cailloux dans nos chaussures, mais j’aime à dire que cela ne nous empêche pas d’avancer. Je pense néanmoins que l’on en a encore pour quelques années.

On sait que 2023, c’est la fin du cookie tiers sur Google Chrome. C’est déjà le cas depuis quelque temps sur Safari ou sur Mozilla. Mais Google Chrome représente plus de 70 % de nos audiences, donc ça va avoir un impact très important.

Il est important d’anticiper tout ça et je pense qu’aujourd’hui tous nos partenaires le font et nous permettrons de continuer à suivre nos performances et à adapter nos investissements en fonction de ces performances. On va dans le bon sens. Il est vrai que, après avoir connu un micro suivi de l’ensemble de nos utilisateurs, revenir trois ou quatre ans en arrière où l’on était un peu plus aveugles et où l’on avait des stratégies plus macro. Ça peut paraître étrange, mais il est nécessaire d’y réfléchir. C’est un des gros enjeux de 2022 et au-delà.

Aurais-tu un exemple d’échec marketing dans ta carrière ? Si oui, comment as-tu rebondi ?

J’en ai un, même si ce n’est pas vraiment un échec. Lorsque j’ai rejoint PerfectStay, on était une toute petite équipe, on a démarré à cinq, on faisait tout nous-mêmes.

Une des clés de notre stratégie marketing chez PerfectStay est de créer des bases de membres. Il faut en effet être inscrit sur nos plateformes via une adresse email et un mot de passe pour découvrir nos voyages. Ensuite, nous activons ces membres via notre stratégie d’envoi d’email afin de les faire convertir.

Avec l’un de nos partenaires principaux, nous avions commencé à créer une base de données membres qui était assez importante, nous mettions en place notre stratégie d’activation avec un volume d’emails hebdomadaires assez important. On travaille sur de la vente flash, donc on envoie beaucoup d’emails et lorsqu’on prépare ses emails, on a un BAT qui part avant de placer son segment et de programmer la campagne pour le lendemain.

Malheureusement, je n’ai pas appuyé sur le bouton Test BAT, mais j’ai cliqué sur le bouton Envoi pour tous les produits, alors qu’ils n’étaient pas encore sortis à ce moment là. L’email a été envoyé à des centaines de milliers de personnes alors qu’il manquait encore 50 % du contenu. Nous avons été obligés d’envoyer un email d’excuse et avons reprogrammé cette campagne lorsque tous les produits ont été disponibles.

Est-ce qu’il y a une question que tu poses systématiquement en entretien de recrutement et si oui, laquelle ?

Je pose toujours la même question en fin d’entretien : quelle est votre plus grande fierté, qu’elle soit professionnelle ou personnelle ? Cette question permet de vraiment comprendre la personnalité de la personne qui est en face de nous, d’identifier si cette personne est passionnée. Je trouve que c’est une question qui entraîne toujours des discussions intéressantes avec le candidat. J’ai besoin que tout le monde ait une personnalité au top chez PerfectStay. Nous avons des enjeux qui sont très importants au niveau de la structure et tout le monde doit aller dans la même direction. Ça passe toujours par une personnalité qui matche avec la personnalité de PerfectStay et des équipes.